Le « royalisme » est un archaïsme

Publié le par Ofek

Ivan Rioufol  - Le Figaro
 
 
Attention à l'atterrissage !
 
Non, le PS n'a pas changé. Il ne voit que ce qu'il croit. Son dogmatisme colle à Ségolène Royal, qui jure pourtant ne vouloir croire que ce qu'elle voit. Si cela était, la seule réalité des SDF, abrités sous des tentes dans les rues des villes, aurait dû l'alerter sur un système qui ­produit sept millions de pauvres (moins de 788 euros par mois) et fait craindre à un Français sur deux de rejoindre ces sans-abri, qui ont un travail pour 30 % d'entre eux.
Or, la candidate entend conserver les mécanismes du ­déclin.
 
Pour Royal, « le libéralisme, c'est le désordre ».
Elle en est encore à accuser le patronat de ne pas embaucher, quand celui-ci lui fait remarquer que les « entreprises françaises sont les plus taxées au monde » (Laurence Parisot).
Elle persiste à voir dans les 35 heures un « formidable ­progrès social », alors qu'aucun pays n'a jugé utile de reprendre cette mesure, qui entrave la ­compétitivité.
Le «royalisme» est un archaïsme.
 
François Hollande le confirme. Alors que des milliers de ­contribuables, assommés par l'impôt, n'ont pas attendu Johnny Hallyday pour rejoindre la Suisse, la Belgique, la Grande-Bretagne, le Canada ou les États-Unis, le premier secrétaire du PS, compagnon de madame, a annoncé la décision du parti de revenir « sur toutes les baisses d'impôt », de supprimer le bouclier fiscal, de créer une « CSG-retraite ». (Le Monde, mardi).
L'esprit de famille.
 
Tout à son objectif de reconquête des classes populaires, dont 32 % des suffrages s'étaient portés sur Jean-Marie Le Pen en 2002 contre 15 % sur Lionel Jospin, le PS est incapable de s'ouvrir à d'autres méthodes que celles qui ont eu pour conséquence d'appauvrir les plus modestes et de chasser les plus riches.
En assurant, hier, que « les prélèvements n'augmenteront pas » (Jean-Louis Bianco), les socialistes en sont à mimer Alphonse Allais, qui voulait « demander plus à l'impôt et moins aux contribuables ». Mais, lui, plaisantait.
 
Les limites de Ségolène Royal s'affirment.
Son masque d'icône - qui a rendu agneau, dimanche sur France 5, un Serge Moati féroce avec Nicolas Sarkozy huit jours avant - n'arrive plus à cacher son orthodoxie dirigiste, ses lacunes, ses rancunes, ses esquives, ses ambiguïtés.
L'état de grâce, qui la faisait marcher sur l'eau, s'estompe. Sa popularité n'arrive pas à prendre l'ascendant sur son ­concurrent.
Le phénomène Royal est en train de faire pschitt.
 
Rupture, vraiment ?
 
Reste, pour Nicolas Sarkozy, à se faire accepter d'électeurs victimes de la paupérisation et réceptifs aux propos du FN, premier parti ouvrier.
Surtout quand Jean-Marie Le Pen dénonce les discriminations au logement ou aux aides sociales que subiraient les Français, en comparaison des aides et soutiens dont bénéfi­cieraient les nouveaux venus issus de l'immigration.
Si le thème de la préférence nationale ne semble plus être aussi porteur pour le FN (sondage Le Monde, 15 décembre), celui des inégalités de traitement demeure au coeur des ressentiments.
 
 
Jusqu'où le président de l'UMP est-il prêt à aller pour faire venir à lui ces citoyens, également sollicités par Ségolène Royal ?
En choisissant, lundi dans les Ardennes, le terrain de la compassion pour « la France qui souffre » (« La France qui croit au mérite et à l'effort, la France dure à la peine, la France dont on ne parle jamais parce qu'elle ne se plaint pas, parce qu'elle ne brûle pas les voitures »), Sarkozy n'a fait qu'amorcer une politique, qui pêche par son flou et son peu de goût pour la rupture.
 
Si l'on admet que la faillite du « modèle français » (ses surprotections, sa fonction publique pléthorique, ses lourdeurs) est à la source des désastres qui font que la nation surendettée exporte des bac + 5 et importe des bac - 5, compte trois millions de chômeurs (mais près de 500 000 emplois vacants) et autant de mal logés, c'est le système qu'il faut changer.
Or, le PS ne veut pas quitter sa laisse doctrinaire et l'UMP ne se montre guère plus audacieuse pour transgresser les injonctions antilibérales.
 
 
Peut-être Sarkozy élu peut-il tenir sa promesse, faite lundi, « que d'ici à deux ans plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir et d'y mourir de froid ».
Encore faut-il qu'il propose une nouvelle approche, capable de remettre sur pied une économie créatrice de croissance, d'emplois, de petits boulots, d'initiatives.
S'il s'en tient à reprendre les critiques convenues contre l'euro fort, la Banque centrale, les « patrons voyous », les « entreprises qui délocalisent », « la religion du libre-échange », la ritournelle risque fort de reproduire les mêmes effets.
 
Sectarisme antisectes
 
Cette réticence à admettre des évidences et à se défaire de raisonnements formatés se retrouve, cette semaine, à propos des sectes.
Mardi, une commission parlementaire a accusé les pouvoirs publics de « négligence », au prétexte que ni l'Éducation nationale, ni l'Intérieur n'ont trouvé à redire à la manière dont les enfants de ces mouvements étaient traités et éduqués.
Pour avoir fait remarquer qu'aucun incident n'avait mis en cause les Témoins de Jéhovah concernant des refus de transfusion sanguine, le chef du bureau central des cultes du ministère de l'Intérieur est particulièrement pris à partie. Certes, on ne peut reprocher à ces parlementaires de s'inquiéter de risques d'endoctrinement et de désocialisation d'enfants. Mais leur traque aux sectes, vieille lubie française, s'apparente de plus en plus à une volonté de mise aux normes d'une République laïcarde, inquisitoriale, doctrinaire. Le sectarisme antisectes n'est pas loin.
 
Syndrome de Stockholm
 
Sommes-nous prêts à accepter le monde réel ?
La question ­sera au centre des débats de 2007.
Or, un « syndrome de Stockholm » incite encore la société à une tendresse pour ses geôliers idéo­logues.
S'en guérir, vite.
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